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L A V I G E R I E . be

Feuilles Vertes 11-10

mercredi 17 novembre 2010 par G.Verbist, mafr.

Jalons sur la route d’un islam européen

Actuellement, les musulmans sont classés en deux groupes : les conservateurs/littéralistes et extrémistes(salafistes) face à des musulmans ‘modérés’. Les premiers sont ’ l’autre’ (extrémistes ou méchants) et les seconds sont ‘ comme nous ‘.

« Je suis, comme tant d’autres, effaré par ce que je vois et entends aujourd’hui dans le monde musulman. Mais je suis également attristé par ceux qui semblent trop heureux de décréter que ce qui arrive correspond à la nature de l’islam, et que cela ne changera pas . »

(Amin Maalouf)

« L’image que l’Occident a de l’islam et du monde islamique est celle d’une réalité monolithique largement obscurantiste, qui serait devenue incapable de susciter des forces de renouvellement et de s’adapter aux nouvelles conditions d’existence de l’humanité. L’islam comme réalité spirituelle, mais aussi comme gisement intellectuel en éveil permanent, est ignoré, sciemment ou par manque de culture. »

(Rachid Benzine)

[bleu marine]La ‘ Réforme ‘[/bleu marine] en islam reste à définir, et cela pour trois raisons :
- 1°) elle est revendiquée par certains salafistes jusqu’aux plus libéraux ;
- 2°) beaucoup d’acteurs de communautés musulmanes se rendent compte des limites de la jurisprudence traditionnelle (figh) ;
- 3°) les enjeux communautaires sont considérables, aussi les enjeux nationaux et européens.

[bleu marine]Deux positionnements médians :[/bleu marine] Tariq Ramadan et Tareq Oubrou. Ramadan est philosophe et professeur à Oxford ; Oubrou est théologien et imâm à Bordeaux.

  • « L’ignorance de soi, nourrie par la peur de changer, de se perdre ou plus généralement par la ‘peur de l’autre’ est l’un des dangers majeurs qui guettent la conscience musulmane contemporaine. »
    (Tariq Ramadan)
  • « Les nouveaux penseurs de l’islam souvent n’exercent aucune fonction religieuse au sein d’un lieu de culte. C’est un obstacle à la diffusion de l’esprit de réforme qu’il ne faut pas sous-estimer. »
    (Tareq Oubrou)

Tareq dit qu’il manque souvent à un certain nombre d’intellectuels musulmans une ‘interprétation créatrice’. Il est en effet aisé de déconstruire les structures traditionnelles tandis que que satisfaire un individu en quête de sens est autrement plus ardu.

[bleu marine]Changement de paradigme [/bleu marine] (ensemble des formes diverses d’un mot, ensemble des unités qui peuvent être substituées) :

  • « Plus d’un siècle d’appels à la réforme et tout se passe comme si nous avions atteint les limites des revendications : le renouveau de la lecture des sources scripturaires a permis une revivification de la pensée musulmane, mais il apparait clairement qu’ils n’ont pas les moyens aujourd’hui de formuler des perspectives nouvelles pour l’avenir, de devenir une force de proposition pour réformer le monde dans lequel nous vivons. »
    (Tariq Ramadan)
  • « … je ressens maintenant une certaine révolte, un sentiment d’avoir été trompé dans ma jeunesse de militant par les discours rébarbatifs classiques qui sont plus des sermons que des idées intellectuelles, telles que j’ai pu découvrir par la suite. »
    (T.Oubrou)

LES DEUX critiquent un profond décalage entre les défis du monde actuel et les positionnements présents dans les communautés musulmanes. Ce profond décalage se remarque aussi dans le ‘Conseil Européen de la fatwa’.

« Ce Conseil reste quand même étranger culturellement à la civilisation occidentale. Il est trop arabe à tous les égards. »

(T.Oubrou)

Dans les communautés musulmanes on assiste aujourd’hui à une ‘réforme de l’adaptation’ : on tente de répondre aux défis d’un système mondialisé non pas en proposant une éthique qui refondrait le système, mais en se créant simplement des « niches dans lesquelles la morale islamique sera un tant soit peu protégée. »

(T.Ramadan)
  • [bleu marine]Oubrou propose : la ‘Sharia de minorité’ :[/bleu marine] que le musulman pratiquant par choix puisse pratiquer authentiquement sa religion avec des normes non handicapées dans sa vie quotidienne, sociale, spirituelle, affective, etc… et ce avec l’aide d’un fiqh (loi islamique) ‘mobile’.
  • [bleu marine]Tariq Ramadan propose une ‘réforme de la transformation’ :[/bleu marine] à l’aide des connaissances acquises aujourd’hui sur l’homme et la vie, proposer des solutions novatrices pour tous les êtres humains. Il ne faut pas se borner aux pratiques de la Loi islamique, mais aller plus fondamentalement aux sources et aux fondements de la Loi islamique. Il propose de placer au même niveau les ‘Deux Révélations’, les Textes fondateurs et le contexte. Ce contexte est la connaissance des sciences de l’homme, de l’univers et des sociétés. L’objet est donc d’intégrer les sciences dans l’éthique contemporaine.
(d’après Steven Duarde, in OUMA.com – sept.oct.2010)

[marron]LIVRES intéressants :[/marron]

  • [vert]“Islam. La Réforme Radicale”[/vert] Tariq Ramadan. Edit. Presses du Châtelet, Paris 2008.
  • [vert]“Radicale Hervorming : islamitische ethiek en bevrijding”[/vert] Tariq Ramadan. Uitg. Van Gennep. Amsterdam 2010. 445 blz. 29,90 €.
  • [vert]“Tareq Oubrou. Profession imâm. Entretiens avec l’imâm de Bordeaux.”[/vert] Edit. Albin. 2009. 250 p. 17,95 €
[marron]VVVVVVVVVVVVVVV[/marron]

Bruxelles, ville musulmane ?

( in Le Soir 28.10.2010 )

[vert]Le sociologue FELICE DASSETTO[/vert] (président du Centre interdisciplinaire d’études de l’Islam dans le monde contemporain – Cismoc, UCLouvain-la-Neuve) s’est immergé dans les “territoires musulmans” de Bruxelles.

Sa recherche de terrain met en évidence [bleu marine] la méconnaissance vis-à-vis des populations islamisées [/bleu marine]. Aussi les déficiences de l’approche politique du phénomène. Il a tenu une conférence sur ce sujet à Bruxelles le 27 octobre 2010.

  • “ Beaucoup de recherches ont porté sur la ville de Bruxelles, sur les relations interculturelles, mais on y aborde très peu l’Islam. Il fait partie du non-dit implicite. En revanche, l’Islam est devenu le cheval de bataille de polémistes et d’imprécateurs, voir de certains politiciens qui clament la peur de l’Islam.

    Le sujet méritait d’être objectivé. C’est pourquoi je me suis replongé dans le terrain bruxellois. J’ai interviewé 150 acteurs. En veillant, d’abord, à livrer [bleu marine] une description panoramique des réalités locales de l’islam [/bleu marine] : le monde des mosquées, les associations, les écoles musulmanes, l’économie réelle et virtuelle, les acteurs politiques, souvent coincés entre leur identité et les intérêts de leur parti, qui les force à occulter leur islamité... Bref, les multiples facettes de l’Islam à Bruxelles.

    Le deuxième volet de mon étude est [bleu marine] la facette religieuse [/bleu marine] : l’analyse des différents courants de l’Islam bruxellois. Ceux qui en parlent les évoquent toujours de façon très sommaire, en insistant sur les dangers que représenteraient les Frères musulmans ou les salafistes... Des catégories qui ne correspondent absolument pas à la réalité bruxelloise.

    La ville entre dans une phase nouvelle : la “postsecular city”, cité contemporaine où [bleu marine] le religieux occupe une place nouvelle dans l’espace public [/bleu marine].

    Bruxelles est globale, inégalitaire, multiculturelle. Sa population islamisée répond à une typologie très contrastée. J’ai identifié [bleu marine] sept modèles différents [/bleu marine]. Mais aussi, effectivement, des “territoires musulmans” marqués par leur identité ethnique et religieuse, des quartiers “ethno-islamiques” : la rue du Brabant, une partie de Molenbeek, l’ensemble Saint Josse/Schaerbeek, Midi-Lemonnier, Aumale, et les abords de la mosquée du Cinquantenaire. L’enjeu fondamental est de voir comment une ville présentant une telle densité de présence religieuse, où l’espace public a pris une nouvelle dimension, peut ou pas pleinement intégrer ces quartiers. Ce qui est sûr, désormais, c’est que [bleu marine] l’islam est une composante structurante de l’espace public bruxellois [/bleu marine].”

Chemsi Chéref-Khan, un des leaders du Parti populaire, qui incarne la droite laïque radicale, organise un colloque, le 13 novembre 2010, à l’ULB, sur le thème “ une majorité musulmane à Bruxelles en 2030 “.

[vert]Qu’en pensez-vous ?[/vert]

  • “ Cette façon de présenter les choses témoigne à la fois d’une méconnaissance des réalités du terrain et d’une crainte de principe. Cela relève un peu du fantasme, d’une attitude typique du XIXe siècle qui consiste à faire front face aux dynamiques religieuses. La stratégie de la Ligne Maginot, qui a prouvé toute son inefficacité.

    Avant de poser un jugement, j’essaie de comprendre, mais sans faire de concessions ! Jamais je n’ai adouci le regard ou occulté des réalités. Et j’avoue qu’après être retourné sur le terrain après une dizaine d’années, certaines évolutions m’ont surpris. Des évolutions surprenantes. On sent bien l’emprise d’un discours moral rigoriste, littéraliste, auprès de la jeunesse musulmane. On est très loin d’un danger terroriste, mais il est clair [bleu marine] qu’une génération risque là de se retrouver en porte-à-faux par rapport au reste de la société [/bleu marine]. L’islam ’populaire’ marocain a perdu de son influence, tout comme le courant des Frères musulmans. Autre évolution marquante : [bleu marine] le retour en force des influences externes [/bleu marine], avec un étonnant face-à-face turco-marocain. On nous vente le mythe d’un islam malékite ’modéré’, son offre de services présentant l’avantage présumé de “protéger la Belgique des évolutions intégristes”...

    La plupart des commentateurs n’ont pas conscience que l’Islam, comme toute réalité sociale, est à la fois multiple et en construction permanente. L’Islam n’est pas définitif, figé, compact. Il évolue, se construit presque par tâtonnements, au gré des débats qui agitent les musulmans et la société.

    Les politiques ne sont pas fondées sur la situation réelle. Prenez le processus de reconnaissance des mosquées. Sur 70 mosquées bruxelloises, à peine 5 sont reconnues. Et on s’en étonne. Mais on ne se demande pas si le processus mis en place répond aux attentes réelles des musulmans bruxellois. La reconnaissance, telle qu’on l’a instaurée, se fonde sur un clivage par nationalités : les mosquées “marocaines”, “turques”, etc. La politique institutionnalise ainsi un clivage qui ne correspond pas à la réalité du terrain, mais qui, en plus, renforce la vision passéiste d’un Islam de Belgique ’controlé’ par le Maroc ou la Turquie.”

Un livre de Dassetto sortira début 2011, aux Presses universitaires de Louvain [vert]“L’Iris et le Croissant”[/vert]

GROUPE RENCONTRE,
par G.Verbist, mafr.

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